Pompeyo : retour aux sources
Il y a quelques mois, nous vous parlions des nombreux mystères qui entourent encore les lamantins. Aujourd’hui nous souhaitons mettre en lumière l’histoire extraordinaire d’un jeune lamantin, dont un nouveau chapitre de vie vient d’être écrit…
Entre le Bélize et le Mexique, au nord du Rio Hondo, se trouve une étendue aux eaux turquoise qui porte le nom de « Laguna Milagros » – la lagune des miracles, en espagnol -. C’est dans ce lieu chargé de mystères que commence l’histoire de Pompeyo…
Au mois d’août 2021, des habitants de Huay Pix repèrent un jeune lamantin dans cette lagune. Après plusieurs minutes à l’observer, les personnes sur place finissent par réaliser que la maman est absente des environs ; les villageois décident alors de contacter les autorités compétentes. De prime abord, cette situation n’est pas particulièrement inquiétante, car il arrive parfois qu’une mère s’éloigne de son petit le temps d’aller se nourrir, il est donc primordial de ne pas se précipiter avant de récupérer le jeune lamantin. Une journée entière s’écoule finalement, et la mère du petit n’a toujours pas pointé le museau à la surface. Le jeune sirénien ne s’est donc pas nourri depuis au moins 24 heures, et il est temps d’agir. Il est alors confié au Santuario del Manati, situé au bord de la laguna Guerrero, où il sera nommé « Pompeyo » par les écoliers de la région, en hommage au marin Othon Pompeyo Blanco qui a fondé la ville de Chetumal.
Plusieurs hypothèses émises
Personne ne sait réellement ce qui a pu se produire avec sa maman, mais des hypothèses sont émises : il arrive parfois que les courants éloignent les petits de leur mère. Lorsque cela se produit, les mères et les petits vocalisent pour se retrouver. Malheureusement, l’environnement devenant de plus en plus bruyant à cause des activités nautiques et touristiques, il se peut qu’une mère soit incapable d’entendre les cris de son petit et ne puisse le rejoindre. Les activités nautiques provoquent également des collisions avec les lamantins, alors mutilés par les hélices des bateaux. Ces blessures entrainent souvent la mort des individus blessés.
Un apprentissage du nourrissage étape par étape
Les premiers mois, Pompeyo est nourri avec du lait vétérinaire, dans lequel des morceaux d’excréments de lamantins sont introduits. Cela permet au jeune individu de développer la flore intestinale essentielle à sa survie. Peu à peu, de la salade est mélangée au lait, facilitant la transition vers le sevrage. Une fois complétement sevré, la salade est placée au fond de l’enclos de Pompeyo, de façon à lui apprendre à plonger pour chercher sa nourriture. La dernière étape de l’apprentissage du jeune lamantin concerne le passage de la salade aux algues comestibles naturellement présentes dans son écosystème. Ces dernières sont incorporées régulièrement à son alimentation sous forme de tacos roulés dans une feuille de salade.
Le contact avec les humains est aussi grandement restreint de façon à rendre Pompeyo le plus indépendant possible. Des études récentes ont en effet montré que les lamantins élevés par les Hommes restent dans les rivières près des villages après le relâché, ce qui les rend plus vulnérables face aux collisions avec les engins nautiques, et ne facilite pas leur intégration auprès des individus sauvages.
Le grand jour est arrivé !
Aujourd’hui, deux ans et demi après son sauvetage, Pompeyo a enfin retrouvé ses congénères sauvages. Le vendredi 3 novembre, les équipes du Santuario, accompagnées par la gouverneure de l’état du Quintana Roo, ont pu relâcher le jeune lamantin après l’avoir équipé d’un émetteur GPS. Il est dorénavant suivi à distance par une équipe de vétérinaires et de biologistes qui veille sur lui au quotidien. Le plus gros défi est maintenant de le voir s’intégrer correctement avec les individus sauvages qui fréquentent les eaux de la baie de Chetumal, et qu’il s’accouple avec les femelles. À cette période de l’année, celles-ci remontent les lagunes pour mettre bas, il faut donc espérer que cela facilitera la rencontre de Pompeyo avec d’autres membres de son espèce. Nous croisons très fort les doigts !
Si vous souhaitez aider à la conservation des espèces menacées, vous pouvez faire un don à Beauval Nature. Les fonds récoltés seront reversés à l’un des programmes de conservation et de recherche que Beauval Nature soutient.
